En
ce qui concerne les mots Cao Dai, dont la traduction littérale
est Palais Suprême, on les trouve dans les livres de prières bouddhiques.
Thuong
tau Cao-Dai ou Prières à Cao-Dai comme dans les commentaires
du Dao Duc Kinh (Livre de la Voie et de la Vertu) de Lao Tseu et
dans le Kinh Sam de Quan Thanh De Quan (Message No 81 du Turenne
Chinois, Quan Thanh De des Trois Royaumes de Chine), paru depuis
très longtemps et existant dans toutes les pagodes dédiée au culte de
ce Saint Homme.
L'autre
part, les mots Cao Dai sont imprimés dans une édition en caractères
chinois de la Société Biblique Britanique et Etrangère, édition parue
en 1913 à Shanghai. Nous y lisons, en effet, au chapitre 94, 22è alinéa,
à peu près ceci :
" O Jéhova ! Tu es bien le Palais Suprême
(CAO-DAI) où nous prenons refuge :
Oh Dieu ! Tu es bien la Grosse Pièrre, derrière
laquelle nous nous abritons."
III
Quant
à "l'Œil de Dieu", qui matérialise aux yeux imparfaits des humains
l'image du Créateur que nous adorons depuis 1926, il figure sur la première
page du Catéchisme-Album édité par Librairie Saint-Joseph, Tolba et Simonet,
éditeurs (Paris), et existant dans toutes les Eglises Catholiques.
On y lit, en effet, la définition suivante :
"Dieu est esprit, il ne peut-être vu de nos yeux,
ni par conséquent représenté sur une image. Cet Œil vous rappelle que
Dieu est la souveraine Intelligence, qu'il sait tout et voit tout. On
l'encadre du soleil, car Dieu est le vrai Soleil qui éclaire et réchauffe
tout et porte la vie partout, Dieu est la Lumière Eternelle"
D'autre
part, dans son message du 26 Février 1926 Ngoc-Hoang-Thuong-De
dit Cao-Dai s'exprime comme suit :
"Ce
n'est pas encore le moment pour vous de savoir pourquoi vous m'adorez
par l'image symbolique d'un Œil. Voici toutefois, en substance, ce que
celà signifie :
"L'Oeil est le moteur du cœur,
"Le maître souverain de la perception visuelle.
"La perception visuelle procède du principe intelligent,
"Le principe intelligent procède du principe
divin,
"Le principe divin, c'est Moi ".
*
* *
Quand Dieu se révèla à Moïse, IL lui dit simplement
: "Je suis ce que je suis", sans achever de dire ce qu'IL est,
car dans le langage imparfait des hommes, il n'y a pas de noms qui puissent
l'exprimer. Non seulement, on ne peut, avec le sens limite des mots, définir
l'Être Infini, mais encore on ne peut se faire une idée de sa nature parce
qu'elle dépasse tout les sens, ni de sa forme parcequ'IL n'a pas de forme.
C'est, croyons nous, pour cette raison que le Maître Tout Puissant s'est
fait présenter symboliquement par un "Œil", ne voulant pas,
comme IL l'avait fait à Moïse, achever de dire comment IL est.
Aristote,
une des intelligences les plus vastes qui aient jamais existé, avait également
conçu l'idée de ce symbole de l'Être Suprême. A la question que lui posa
Secundus sur la conception de Dieu, il répondit : " C'est le Bien existant
par lui-même, une Hauteur invisible, un Être qu'on ne peut comprendre,
un Esprit immortel et qui pénètre tout, UN ŒIL TOUJOURS OUVERT ( C'est
nous qui soulignons.), l'Essence propre de toutes choses, un Pouvoir
qui a plusieurs noms, une Main Toute-Puissante : Dieu est Lumière, Intelligence
et Force".
Ainsi,
cet Œil symbolique signifie que Dieu voit tout, qu'IL est présent partout
et à tout instant, témoin de tout les actes bons ou mauvais de ses créatures.
N'est-ce-pas là le symbole parfait de l'Intelligence Suprême et de la
Lumière Divine, au contact de laquelle s'épure la pensée humaine ?
Puisque
rien ne peut échapper à la vigilance et à la perspicacité de l'Être qui
pénètre tout, cet "Œil sacré" que les Caodaïstes voient à chaque instant
sur leur autel, cet Œil qu'ils sentent pénètrer jusqu'au tréfond de leur
âme, cet Œil les juge, les soutient et les réconforte, les aide
et les force au besoin à se tenir dans la voie du bien.
A
ceux qui se livrent à nos dépens à des plaisanteries faciles ou à des
insinuations malvaillantes à propos de l'Œil sacré, nous nous contentons
de dire qu'il convient de n'y attacher que le sens et la valeur d'un symbole.
A une certaine étape de son évolution intellectuelle et religieuse, l'homme,
pour comprendre Dieu, l'a fait à son image. Plus affiné, l'esprit humain
le voit aujoud'hui sous une figuration moin matérielle, plus synthétique.
Peut-être, demain, élevé sur un plan supérieur, lui sera t-il donné, par
la seule puissance de l'abstraction, de concevoir l'Etre Suprême dans
son essence, de le contempler face à face dans toute sa splendeur, sans
le secours de l'art humain, dont toutes les créations, depuis les grossiers
fétiches de l'Afrique jusqu'aux chefs-d'œuvre de la peinture et de la
sculpture modernes, ne peuvent en donner que des images plus ou moins
imparfaites.
Revenons
maintenant à l'historique de la nouvelle religion.
Ce fut au début de l'année Binh Dan (1926) que
le Caodaisme fit son apparition en Cochinchine ou plus exactement à Saigon.
Mais longtemps auparavant, des Esprits missionnaires avaient reçu de Dieu
l'ordre d'en préparer l'avènement.
En effet, dans une séance de spiritisme qui avait eu lieu à la
pagode "Mieu Noi" située à Ben Cat (Gia Dinh) le 17 du 6è mois de l'année
Qui Hoi (30 Juillet 1923), l'Esprit Tao-Quoc-Cuu avait révélé ce
qui suit :
"Tâchez
de vous initier au Dao (Tao) pour n'avoir pas à le regretter. Il est
donné rarement aux humains d'en trouver l'occasion, car le Dao est une
chose très précieuse, et rien au monde ne peut lui être comparé. Vous
avez le bonheur et la bonne fortune de voir le Dao apparaître pour la
3è fois. Si vous en jouissez avant les autres, c'est que vous y êtes
prédestinés. C'est par une grâce du Destin que le don de la Troisième
Amnistie de Dieu (Tam-Ky Pho-Do) vous échoit en partage. Des Esprits
Supérieurs sont venus en mission ici-bas pour le sauvetage des âmes
prédestinées. Vous êtes de celles-là. Il dépend donc de votre foi agissante
d'obtenir le succès".
D'autres messages non moins édifiants reçus :
a)
Le 2 Septembre 1923 à la Pagode de Ngoc Hoang (l'Empereur des Cieux)
à Dakao (Saigon) ;
b) Le 1er du mois de l'an Qui Hoi (1923) à la Pagode
Cung-Toan-Hoa (Chine), de Thuong De (Souverain Suprême);
c) Le 13 du 8è mois de l'an Qui Hoi (1923) à la même Pagode,
de l'Esprit Ton Ngo Khong;
d) Le 30 du 10è mois de l'an Giap Ty (1924) à la
même pagode, de l'Esprit Confucius;
e) Le 4 du 11è mois de l'an Giap Ty (1924) à la
même pagode, de l'Esprit Thai At,
laissaient
pressentir également l'avènement du Caodaïsme. Il serait fastidieux de
les énumérer tous.
Si
l'on se reporte à la Bible, on verra que c'est bien aujoud'hui la Troisième
Révélation qui s'est manifestée de la part de Dieu ( les 1ère et 2è Révélations
furent personnifiées dans Moïse et le Christ en Occident, et dans Çakya-Mouni
et Laotseu en Orient).
Le
Christ n'a-t-il pas dit : " Beaucoup de choses que je vous dis, vous
ne pourrez les comprendre, et j'aurais beaucoup d'autres à vous dire que
vous ne comprendriez pas; c'est pourquoi je vous parte en paraboles; mais
plus tard, je vous enverrai le Consolateur, l'Esprit de Vérité, qui rétablira
toutes les choses et vous les expliquera toutes". Jean,chap. XIVXVI;
Mathieu chap. XVII).
*
* *
Ce
fut, avons-nous dit, au début de l'année Binh-Dan (1926) que le Caodaïsme
fut définitivement fondé. Mais depuis six ans dejà, un homme adorait le
Grand Maître Cao Dai : M. le Phu Ngo Van Chieu, alors en
service au 2è Bureau du Gouvernement de la Cochinchine.
Délégué
administratif, en 1919, au poste de Phu Quoc, île située dans le Golfe
de Siam, M. Ngo Van Chieu menait une vie de haute sagesse, conforme aux
règles rigoureuses de la Doctrine Taoiste. De temps en temps, dans cette
localité isolée si propice à la vie religieuse, il s'adonnait, à l'aide
de jeunes médiums de 12 a 15 ans, à l'évocation des Esprits Supérieurs
(Cau Tien) de qui il recevait les instructions nécessaires à son
évolution spirituelle. Parmi les Esprits communicants, il s'en trouvait
un qui se nommait Cao Dai et s'intéressait de façon particulière
au Phu Chieu.
Au
début, ce nom souleva l'étonnement général des personnes présentes, parce
qu'à leur connaissance aucun livre religieux n'en avait fait mention.
Néanmoins, le Phu Chieu, dont la perspicacité faisait l'admiration
de ses camarades, crut y reconnaître un surnom de Dieu à cause des révélations et des enseignements
d'une haute portée philosophique qu'il en avait reçus à maintes reprises.
Ayant
demandé à Cao Dai la permission de l'adorer sous une forme tangible, il
en reçut l'ordre de le représenter par un œil symbolique.
Telle
fut la conversion du premier caodaïste à la nouvelle religion qui devait,
six années plus tard, s'implanter à Saigon. Bientôt, les fonctions administratives
du Phu Chieu le rappelèrent à la capitale, où il conquit quelques
prosélytes à la Foi
nouvelle. Mais quittons pour le moment ces premiers convertis
pour montrer aux
lecteurs
la manière dont le Grand Maître recruta ses médiums.
*
* *
C'était
au milieu de l'année At Suu (1925), un petit groupe de secrétaires annamites
appartenant à diverses administrations à Saigon, se délassaient chaque
soir,
en faisant du spiritisme. Il se servaient à cet effet de la "table frappante".
Les premiers essais furent médiocres. Mais à force de patience et d'entrainement
, ils obtinrent des résultats positifs. Aux questions posées aux Esprit,
soit en vers, sois en prose, ils recevaient des réponses surprenantes.
Leurs parents ou amis défunts se manifestèrent pour leur parler d'affaires
de famille et leur conseiller en même temps l'abnégation. Ces révélations
sensationnelles leur apprirent ainsi l'existence d'un monde occulte.
Toutefois
un des Esprits communicants se faisait remarquer particulièrement par
son assiduité et ses enseignements d'une haute portée morale et philosophique.
Cet Esprit qui signait sous ce pseudonyme "AA'Â" ne voulait
pas se faire connaître, malgré les prières des assistants. Bientôt, d'autres
secrétaires annamites vinrent grossir ce petit groupe de spirites-amateurs.
Les séances devinrent alors plus sérieuses et plus régulières. Comme l'emploi
de la "table frappante" n'était pas commode, l'Esprit en question la fit
remplacer par la "corbeille à bec". Avec cet appareil qui permet l'écriture
directe, les communications devinrent naturellement plus rapides et moins
fatiguantes pour les apprentis médiums.
Le
24 Décembre 1925, à l'occasion de la Noël, l'Esprit guide qui s'était
obstine
jusque-là
à garder l'anonymat, se révéla enfin aux néo-spirites comme étant L'Être
Suprême venant sous le nom de Cao Dai pour enseigner la Vérité au pays
d'Annam. S'exprimant en Annamite. Il dit en substance :
"Réjouissez
vous de cette fête. C'est l'anniversaire de ma venue en Europe pour
enseigner ma doctrine. Je suis très heureux de vous voir, ô disciples
pleins de respect et d'amour, à mon égard. Cette maison (Maison d'un des médiums.) aura toutes mes bénédictions. Les
manifestations de ma Toute-Puissance vous inspireront encore plus de
respect et d'amour à mon égard ..."
Dès lors, le Grand Maître initia ses disciples à la
doctrine nouvelle.
Tel
fut le recrutement des premiers médiums chargés de la réception des messages
divins.
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